Notre Garde des Sceaux et Ministre de la Justice Christiane Taubira serait-elle la nouvelle Simone Veil? Il faut bien reconnaître que son discours à l’Assemblée Nationale lors des premiers débats sur le Mariage pour Tous nous a permis de découvrir une femme de caractère qui sait faire preuve d’autorité et de passion pour le projet de loi qu’elle défend. Un préambule qui n’aura finalement laissé personne indifférent même si de nombreux élus ont brillé par leur absence.
Et l’exercice était de taille, puisque si les opposant au projet n’ont pas eu recours aux insultes comme ce fût le cas lors du discours de Simone Veil au sujet de l’IVG, les députés de droite se sont montrés pour le moins indisciplinés et peu respectueux, interrompant sans cesse la Ministre et essayant de lui couper la parole à plusieurs reprises avec des exclamations que l’on pourrait qualifier de puériles. Mais les « On va pleurer » ou « Sortons les violons », n’ont pas suffi à déconcentrer Mme Taubira qui a tout fait pour que son message à la fois clair et touchant puisse être entendu de tous.
Un retour sur des faits historiques marquants:
Le début de son discours a mis judicieusement l’accent sur les évolutions historiques récentes et moins récentes concernant le mariage et les différentes formes d’unions et de discriminations qui ont marquées la France au cours du dernier siècle.
Un rappel essentiel pour que personne n’oublie que l’institution du mariage telle que la défendent les opposants au projet de loi n’a pas toujours été ce qu’elle est aujourd’hui, rappelant par exemple qu’il y a encore peu de temps, le mariage donnait l’intégralité des droits au seul père de famille ou étant refusé à certaines catégories de personnes autres que les homosexuels, et prouvant ainsi que le projet d’ouverture de cette union civile aux personnes de même sexe n’était en réalité qu’une des nombreuses évolutions qu’a déjà connu ce texte.
Pas de mariage au rabais:
Ayant bien pris connaissance des propositions de l’UMP en faveur d’une Union Civile constituant un PACS amélioré mais ne donnant pas les mêmes droits que le mariage, notamment en termes de filiation, Christiane Taubira a exprimé le refus catégorique du gouvernement de constituer un « mariage au rabais », désirant au contraire préserver les fondamentaux de droits et de devoirs du mariage actuel.
Elle a d’ailleurs profité de ce passage sur la symbolique du mariage pour en rappeler les interdits, citant volontairement l’inceste, la polygamie ou encore l’infidélité, autant d’arguments dont nous ont abreuvés les membres des partis de droite et les manifestants menés par Frigide Barjot et les associations catholiques.
Le droit de l’enfant avant le droit à l’enfant:
Autre précision qui s’avérait nécessaire, le droit de l’enfant a été clairement expliqué par la Garde des Sceaux qui a parlé pendant un long moment de la situation précaire et dangereuse des mineurs de familles homoparentales pour lesquels la loi ne reconnaît qu’un seul parent et qui se retrouvent en cas de drame, doublement pénalisés par la justice.
Toujours au sujet des enfants, Christiane Taubira a mis les choses au clair concernant l’adoption plénière et l’adoption conjointe, qui ne sera autorisée qu’après une enquête sociale complète et dans le respect des conditions déjà appliquées aux couples hétérosexuels aujourd’hui. Une adoption prononcée ne le sera que si elle est conforme aux droits de l’enfant.
Une conclusion historique:
Et la ministre de la Justice de conclure son discours par cette citation du poète Léon-Gontran Damas : L’acte que nous allons accomplir est « beau comme une rose dont la tour Eiffel assiégée à l’aube voit s’épanouir enfin les pétales ». Il est « grand comme un besoin de changer d’air ».
Pour ceux qui ont manqué ce moment historique et chargé d’émotions, voici la vidéo du discours d’ouverture des débats: